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Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente un mur (d'une prison ?), dans lequel apparaît un soupirail, sur la gauche ; à droite, deux yeux semblent lui faire face.

XII. À quatre prisonniers (Après leur condamnation)

À quatre prisonniers – Les références

ChâtimentsLivre IV – La Religion est glorifiée ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 102.

À quatre prisonniers – Enregistrement

Je vous invite à écouter À quatre prisonniers, un poème du recueil Châtiments, Livre IV – La Religion est glorifiée, de Victor Hugo.

À quatre prisonniers (Après leur condamnation)


À quatre prisonniers – Le texte

XII
À quatre prisonniers
(Après leur condamnation.)


Mes fils, soyez contents ; l’honneur est où vous êtes.
Et vous, mes deux amis, la gloire, ô fiers poëtes,
Couronne votre nom par l’affront désigné ;
Offrez aux juges vils, groupe abject et stupide,
Toi, ta douceur intrépide,
Toi, ton sourire indigné.

Dans cette salle où Dieu voit la laideur des âmes,
Devant ces froids jurés, choisis pour être infâmes,
Ces douze hommes, muets, de leur honte chargés,
Ô justice, j’ai cru, justice auguste et sombre,
Voir autour de toi dans l’ombre
Douze sépulcres rangés.

Ils vous ont condamnés, que l’avenir les juge !
Toi, pour avoir crié : la France est le refuge
Des vaincus, des proscrits ! — Je t’approuve, mon fils !
Toi, pour avoir, devant la hache qui s’obstine,
Insulté la guillotine,
Et vengé le crucifix !

Les temps sont durs ; c’est bien. Le martyre console.
J’admire, ô Vérité, plus que toute auréole,
Plus que le nimbe ardent des saints en oraison,
Plus que les trônes d’or devant qui tout s’efface,
L’ombre que font sur ta face
Les barreaux d’une prison !

Quoi que le méchant fasse en sa bassesse noire,
L’outrage injuste et vil là-haut se change en gloire.
Quand Jésus commençait sa longue passion,
Le crachat qu’un bourreau lança sur son front blême
Fit au ciel à l’instant même
Une constellation !

Conciergerie, novembre 1851.