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Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente l'océan, "le flot sombre" quand "l'onde est en furie", avec une vague déferlante. Une forme étrange apparaît sur la droite.

IX. Le chant de ceux qui s’en vont sur mer

Le chant de ceux qui s’en vont sur mer – Les références

ChâtimentsLivre V – L’Autorité est sacrée ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 118.

Le chant de ceux qui s’en vont sur mer – Enregistrement

Je vous invite à écouter le poème Le chant de ceux qui s’en vont sur mer, du Livre V – L’Autorité est sacrée, du recueil Châtiments, de Victor Hugo.
Il est précédé de Le Progrès, calme et fort et toujours innocent….

Le chant de ceux qui s’en vont sur mer


Le chant de ceux qui s’en vont sur mer – Le texte

IX
Le chant de ceux qui s’en vont sur mer
— Air Breton —


Adieu, patrie !
L’onde est en furie.
Adieu, patrie,
Azur !

Adieu, maison, treille au fruit mûr,
Adieu, les fleurs d’or du vieux mur !

Adieu, patrie !
Ciel, forêt, prairie !
Adieu, patrie,
Azur !

Adieu, patrie !
L’onde est en furie.
Adieu, patrie,
Azur !

Adieu, fiancée au front pur,
Le ciel est noir, le vent est dur.

Adieu, patrie !
Lise, Anna, Marie !
Adieu, patrie,
Azur !

Adieu, patrie !
L’onde est en furie.
Adieu, patrie,
Azur !

Notre œil, que voile un deuil futur,
Va du flot sombre au sort obscur !

Adieu, patrie !
Pour toi mon cœur prie.
Adieu, patrie,
Azur !

En mer, 1er août 1852

Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente une éclaircie dans le ciel.

X. Éclaircie

Éclaircie – Les références

Les contemplationsLivre sixième : Au bord de l’infini ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor HugoPoésie II, p 498.

Éclaircie – L’enregistrement

Je vous invite à écouter Éclaircie, un poème du Livre sixième – Au bord de l’infini, des Contemplations, de Victor Hugo.

Éclaircie


Éclaircie – Le texte

X
Éclaircie


L’Océan resplendit sous sa vaste nuée.
L’onde, de son combat sans fin exténuée,
S’assoupit, et, laissant l’écueil se reposer,
Fait de toute la rive un immense baiser.
On dirait qu’en tous lieux, en même temps, la vie
Dissout le mal, le deuil, l’hiver, la nuit, l’envie,
Et que le mort couché dit au vivant debout :
Aime ! et qu’une âme obscure, épanouie en tout,
Avance doucement sa bouche vers nos lèvres.
L’être, éteignant dans l’ombre et l’extase ses fièvres,
Ouvrant ses flancs, ses seins, ses yeux, ses cœurs épars,
Dans ses pores profonds reçoit de toutes parts
La pénétration de la sève sacrée.
La grande paix d’en haut vient comme une marée.
Le brin d’herbe palpite aux fentes du pavé ;
Et l’âme a chaud. On sent que le nid est couvé.
L’infini semble plein d’un frisson de feuillée.
On croit être à cette heure où la terre éveillée
Entend le bruit que fait l’ouverture du jour,
Le premier pas du vent, du travail, de l’amour,
De l’homme, et le verrou de la porte sonore,
Et le hennissement du blanc cheval aurore.
Le moineau d’un coup d’aile, ainsi qu’un fol esprit,
Vient taquiner le flot monstrueux qui sourit ;
L’air joue avec la mouche, et l’écume avec l’aigle ;
Le grave laboureur fait ses sillons et règle
La page où s’écrira le poëme des blés ;
Des pêcheurs sont là-bas sous un pampre attablés ;
L’horizon semble un rêve éblouissant où nage
L’écaille de la mer, la plume du nuage,
Car l’Océan est hydre et le nuage oiseau.
Une lueur, rayon vague, part du berceau
Qu’une femme balance au seuil d’une chaumière,
Dore les champs, les fleurs, l’onde et devient lumière
En touchant un tombeau qui dort près du clocher.
Le jour plonge au plus noir du gouffre, et va chercher
L’ombre, et la baise au front sous l’eau sombre et hagarde.
Tout est doux, calme, heureux, apaisé ; Dieu regarde.

Marine-Terrace, juillet 1855

Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente un horizon de nature, avec un arbre seul sur l'horizon et, près de lui, le soleil couchant.

III. À un ami

À un ami – Les références

Les Chansons des rues et des boisLivre second : SagesseIV. Nivôse ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 1019.

À un ami – L’enregistrement

Je vous invite à écouter Pendant une maladie, un poème du recueil Les Chansons des rues et des bois, du Livre second : SagesseIV. Nivôse , de Victor Hugo.

À un ami


À un ami – Le texte

III
À un ami


Sur l’effrayante falaise,
Mur par la vague entr’ouvert,
Roc sombre où fleurit à l’aise
Un charmant petit pré vert.

Ami, puisque tu me laisses
Ta maison loin des vivants
Entre ces deux allégresses,
Les grands flots et les grands vents,

Salut ! merci ! les fortunes
Sont fragiles, et nos temps,
Comme l’algue sous les dunes,
Sont dans l’abîme, et flottants.

Nos âmes sont des nuées
Qu’un vent pousse, âpre ou béni,
Et qui volent, dénouées,
Du côté de l’infini.

L’énorme bourrasque humaine,
Dont l’étoile est la raison,
Prend, quitte, emporte et ramène
L’espérance à l’horizon.

Cette grande onde inquiète
Dont notre siècle est meurtri,
Écume et gronde, et me jette
Parfois mon nom dans un cri.

La haine sur moi s’arrête.
Ma pensée est dans ce bruit
Comme un oiseau de tempête
Parmi des oiseaux de nuit.

Pendant qu’ici je cultive
Ton champ comme tu le veux,
Dans maint journal l’invective
Grince et me prend aux cheveux.

La diatribe m’écharpe.
Je suis âne ou scélérat ;
Je suis Pradon pour La Harpe,
Et pour de Maistre Marat.

Qu’importe ! les cœurs sont ivres.
Les temps qui viennent feront
Ce qu’ils pourront de mes livres
Et de moi ce qu’ils voudront.

J’ai pour joie et pour merveille
De voir, dans ton pré d’Honfleur,
Trembler au poids d’une abeille
Un brin de lavande en fleur.