Articles

Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente une fleur, des feuilles, au bout de leurs tiges, telles une allégorie du printemps mettant "l'hiver en déroute".

I. Ordre du jour de Floréal

Ordre du jour de Floréal – Les références

Les Chansons des rues et des boisLivre premier : JeunesseI. Floréal ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 845.

Ordre du jour de Floréal – L’enregistrement

Je vous invite à écouter Ordre du jour de Floréal, premier poème du Livre premier : Jeunesse, I. Floréal, du recueil Les Chansons des rues et des bois, de Victor Hugo.
Il est suivi de Orphée, aux bois du Caÿstre….

Ordre du jour de Floréal


Ordre du jour de Floréal – Le texte

I
Ordre du jour de Floréal


Victoire, amis ! je dépêche
En hâte et de grand matin
Une strophe toute fraîche
Pour crier le bulletin.

J’embouche sur la montagne
La trompette aux longs éclats ;
Sachez que le printemps gagne
La bataille des lilas.

Jeanne met dans sa pantoufle
Son pied qui n’est plus frileux ;
Et voici qu’un vaste souffle
Emplit les abîmes bleus.

L’oiseau chante, l’agneau broute ;
Mai, poussant des cris railleurs,
Crible l’hiver en déroute
D’une mitraille de fleurs.

Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente, de façon abstraite, la propagation du bleu dans les creux de l'ombre.

XXII. La clarté du dehors…

La clarté du dehors… – Les références

Les ContemplationsLivre troisième : Les Luttes et les rêves ;
Collection Bouquins chez Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 360.

La clarté du dehors… – L’enregistrement

Je vous invite à écouter La clarté du dehors…, un poème du recueil Les Contemplations, du livre Les Luttes et les rêves, de Victor Hugo.
Il est précédé de XXI. Écrit sur la plinthe d’un bas-relief antique et suivi de XXIII. Le Revenant.

La clarté du dehors…


La clarté du dehors… – Le texte

XXII


La clarté du dehors ne distrait pas mon âme.
La plaine chante et rit comme une jeune femme ;
Le nid palpite dans les houx ;
Partout la gaîté luit dans les bouches ouvertes ;
Mai, couché dans la mousse au fond des grottes vertes,
Fait aux amoureux les yeux doux.

Dans les champs de luzerne et dans les champs de fèves,
Les vagues papillons errent, pareils aux rêves ;
Le blé vert sort des sillons bruns ;
Et les abeilles d’or courent à la pervenche,
Au thym, au liseron, qui tend son urne blanche
À ces buveuses de parfums.

La nue étale au ciel ses pourpres et ses cuivres ;
Les arbres, tout gonflés de printemps, semblent ivres ;
Les branches, dans leurs doux ébats,
Se jettent les oiseaux du bout de leurs raquettes ;
Le bourdon galonné fait aux roses coquettes
Des propositions tout bas.

Moi, je laisse voler les senteurs et les baumes,
Je laisse chuchoter les fleurs, ces doux fantômes,
Et l’aube dire : Vous vivrez !
Je regarde en moi-même, et, seul, oubliant l’heure,
L’œil plein des visions de l’ombre intérieure,
Je songe aux morts, ces délivrés !

Encore un peu de temps, encore, ô mer superbe,
Quelques reflux ; j’aurai ma tombe aussi dans l’herbe,
Blanche au milieu du frais gazon,
À l’ombre de quelque arbre où le lierre s’attache ;
On y lira : — Passant, cette pierre te cache
La ruine d’une prison.

Ingouville, mai 1843.

Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente un village entouré de fumées. Sur sa terre est inscrit : "VICTOR HUGO". "Quand la terre est embaumée, Le cœur de l'homme est meilleur."

XXIII. Après l’hiver

Après l’hiver – Les références

Les ContemplationsLivre deuxième : L’Âme en fleur ;
Collection Bouquins chez Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 319.

Après l’hiver – L’enregistrement

Je vous invite à écouter Après l’hiver, un poème du recueil Les Contemplations, L’Âme en fleur, de Victor Hugo.
Il est précédé de XXII. Aimons toujours ! aimons encore !… et suivi de XXIV. Que le sort, quel qu’il soit….

Après l’hiver


Après l’hiver – Le texte

XXIII
Après l’hiver


Tout revit, ma bien-aimée !
Le ciel gris perd sa pâleur ;
Quand la terre est embaumée,
Le cœur de l’homme est meilleur.

En haut, d’où l’amour ruisselle,
En bas, où meurt la douleur,
La même immense étincelle
Allume l’astre et la fleur.

L’hiver fuit, saison d’alarmes,
Noir avril mystérieux
Où l’âpre sève des larmes
Coule, et du cœur monte aux yeux.

Ô douce désuétude
De souffrir et de pleurer !
Veux-tu, dans la solitude,
Nous mettre à nous adorer ?

La branche au soleil se dore
Et penche, pour l’abriter,
Ses boutons qui vont éclore
Sur l’oiseau qui va chanter.

L’aurore où nous nous aimâmes
Semble renaître à nos yeux ;
Et mai sourit dans nos âmes
Comme il sourit dans les cieux.

On entend rire, on voit luire
Tous les êtres tour à tour,
La nuit, les astres bruire,
Et les abeilles, le jour.

Et partout nos regards lisent,
Et, dans l’herbe et dans les nids,
De petites voix nous disent :
« Les aimants sont les bénis ! »

L’air enivre ; tu reposes
À mon cou tes bras vainqueurs.
Sur les rosiers que de roses !
Que de soupirs dans nos cœurs !

Comme l’aube, tu me charmes ;
Ta bouche et tes yeux chéris
Ont, quand tu pleures, ses larmes,
Et ses perles quand tu ris.

La nature, sœur jumelle
D’Ève et d’Adam et du jour,
Nous aime, nous berce et mêle
Son mystère à notre amour.

Il suffit que tu paraisses
Pour que le ciel, t’adorant,
Te contemple ; et, nos caresses,
Toute l’ombre nous les rend !

Clartés et parfums nous-mêmes,
Nous baignons nos cœurs heureux
Dans les effluves suprêmes
Des éléments amoureux.

Et, sans qu’un souci t’oppresse,
Sans que ce soit mon tourment,
J’ai l’étoile pour maîtresse,
Le soleil est ton amant ;

Et nous donnons notre fièvre
Aux fleurs où nous appuyons
Nos bouches, et notre lèvre
Sent le baiser des rayons.

Juin 18..