Les Chansons des rues et des bois – Livre premier : Jeunesse – VI. L’Éternel Petit Roman ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 944.
À Rosita – L’enregistrement
Je vous invite à écouter À Rosita, un poème du Livre premier : Jeunesse, VI. L’Éternel Petit Roman, du recueil Les Chansons des rues et des bois, de Victor Hugo.
À Rosita
À Rosita – Le texte
V
À Rosita
Tu ne veux pas aimer, méchante ?
Le printemps en est triste, vois ;
Entends-tu ce que l’oiseau chante
Dans la sombre douceur des bois ?
Sans l’amour rien ne reste d’Ève ;
L’amour, c’est la seule beauté ;
Le ciel, bleu quand l’astre s’y lève,
Est tout noir, le soleil ôté.
Tu deviendras laide toi-même
Si tu n’as pas plus de raison.
L’oiseau chante qu’il faut qu’on aime,
Et ne sait pas d’autre chanson.
http://entendre-victor-hugo.com/wp-content/uploads/2015/05/arosita-roman-chansons-bois.jpg600800Pierre-François Kettlerhttp://entendre-victor-hugo.com/wp-content/uploads/2014/08/logo-site-essai-300x137.jpgPierre-François Kettler2015-05-26 12:06:232018-06-14 10:20:21V. À Rosita
Les contemplations – Livre premier : Aurore ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo – Poésie II, p 274.
À propos d’Horace – L’enregistrement
Je vous invite à écouter À propos d’Horace, un poème des Contemplations, de Victor Hugo, du premier livre : Aurore.
Il est précédé de XII. Vere Novo et suivi de XIV. À Granville, en 1836.
À propos d’Horace
À propos d’Horace – Le texte
XIII
À propos d’Horace
Marchands de grec ! marchands de latin ! cuistres ! dogues !
Philistins ! magisters ! je vous hais, pédagogues !
Car, dans votre aplomb grave, infaillible, hébété,
Vous niez l’idéal, la grâce et la beauté !
Car vos textes, vos lois, vos règles sont fossiles !
Car, avec l’air profond, vous êtes imbéciles !
Car vous enseignez tout, et vous ignorez tout !
Car vous êtes mauvais et méchants ! — Mon sang bout
Rien qu’à songer au temps où, rêveuse bourrique,
Grand diable de seize ans, j’étais en rhétorique !
Que d’ennuis ! de fureurs ! de bêtises ! — gredins ! —
Que de froids châtiments et que de chocs soudains !
« Dimanche en retenue et cinq cents vers d’Horace ! »
Je regardais le monstre aux ongles noirs de crasse,
Et je balbutiais : « Monsieur… — Pas de raisons !
« Vingt fois l’ode à Plancus et l’épître aux Pisons ! »
Or j’avais justement, ce jour-là, — douce idée
Qui me faisait rêver d’Armide et d’Haÿdée, —
Un rendez-vous avec la fille du portier ;
Grand Dieu ! perdre un tel jour ! le perdre tout entier !
Je devais, en parlant d’amour, extase pure !
En l’enivrant avec le ciel et la nature,
La mener, si le temps n’était pas trop mauvais,
Manger de la galette aux buttes Saint-Gervais !
Rêve heureux ! je voyais, dans ma colère bleue,
Tout cet éden, congé, les lilas, la banlieue,
Et j’entendais, parmi le thym et le muguet,
Les vagues violons de la mère Saguet !
Ô douleur ! Furieux, je montais à ma chambre,
Fournaise au mois de juin, et glacière en décembre ;
Et, là, je m’écriais :
— Horace ! ô bon garçon !
Qui vivais dans le calme et selon la raison,
Et qui t’allais poser, dans ta sagesse franche,
Sur tout, comme l’oiseau se pose sur la branche,
Sans peser, sans rester, ne demandant aux dieux
Que le temps de chanter ton chant libre et joyeux !
Tu marchais, écoutant le soir, sous les charmilles,
Les rires étouffés des folles jeunes filles,
Les doux chuchotements dans l’angle obscur du bois ;
Tu courtisais ta belle esclave quelquefois,
Myrtale aux blonds cheveux, qui s’irrite et se cabre
Comme la mer creusant les golfes de Calabre ;
Ou bien tu t’accoudais à table, buvant sec
Ton vin que tu mettais toi-même en un pot grec.
Pégase te soufflait des vers de sa narine ;
Tu songeais ; tu faisais des odes à Barine,
À Mécène, à Virgile, à ton champ de Tibur,
À Chloë, qui passait le long de ton vieux mur,
Portant sur son beau front l’amphore délicate.
La nuit, lorsque Phœbé devient la sombre Hécate,
Les halliers s’emplissaient pour toi de visions ;
Tu voyais des lueurs, des formes, des rayons,
Cerbère se frotter, la queue entre les jambes,
À Bacchus, dieu des vins et père des ïambes ;
Silène digérer dans sa grotte, pensif ;
Et se glisser dans l’ombre, et s’enivrer, lascif,
Aux blanches nudités des nymphes peu vêtues,
Le faune aux pieds de chèvre, aux oreilles pointues !
Horace, quand grisé d’un petit vin sabin,
Tu surprenais Glycère ou Lycoris au bain,
Qui t’eût dit, ô Flaccus ! quand tu peignais à Rome
Les jeunes chevaliers courant dans l’hippodrome,
Comme Molière a peint en France les marquis,
Que tu faisais ces vers charmants, profonds, exquis,
Pour servir, dans le siècle odieux où nous sommes,
D’instruments de torture à d’horribles bonshommes,
Mal peignés, mal vêtus, qui mâchent, lourds pédants,
Comme un singe une fleur, ton nom entre leurs dents !
Grimauds hideux qui n’ont, tant leur tête est vidée,
Jamais eu de maîtresse et jamais eu d’idée !
Puis j’ajoutais, farouche :
— Ô cancres ! qui mettez
Une soutane aux dieux de l’éther irrités,
Un béguin à Diane, et qui de vos tricornes
Coiffez sinistrement les olympiens mornes,
Eunuques, tourmenteurs, crétins, soyez maudits !
Car vous êtes les vieux, les noirs, les engourdis,
Car vous êtes l’hiver ; car vous êtes, ô cruches !
L’ours qui va dans les bois cherchant un arbre à ruches,
L’ombre, le plomb, la mort, la tombe, le néant !
Nul ne vit près de vous dressé sur son séant ;
Et vous pétrifiez d’une haleine sordide
Le jeune homme naïf, étincelant, splendide ;
Et vous vous approchez de l’aurore, endormeurs !
À Pindare serein plein d’épiques rumeurs,
À Sophocle, à Térence, à Plaute, à l’ambroisie,
Ô traîtres, vous mêlez l’antique hypocrisie,
Vos ténèbres, vos mœurs, vos jougs, vos exeats,
Et l’assoupissement des noirs couvents béats ;
Vos coups d’ongle rayant tous les sublimes livres,
Vos préjugés qui font vos yeux de brouillards ivres,
L’horreur de l’avenir, la haine du progrès ;
Et vous faites, sans peur, sans pitié, sans regrets,
À la jeunesse, aux cœurs vierges, à l’espérance,
Boire dans votre nuit ce vieil opium rance !
Ô fermoirs de la bible humaine ! sacristains
De l’art, de la science, et des maîtres lointains,
Et de la vérité que l’homme aux cieux épelle,
Vous changez ce grand temple en petite chapelle !
Guichetiers de l’esprit, faquins dont le goût sûr
Mène en laisse le beau ; porte-clefs de l’azur,
Vous prenez Théocrite, Eschyle aux sacrés voiles,
Tibulle plein d’amour, Virgile plein d’étoiles,
Vous faites de l’enfer avec ces paradis !
Et, ma rage croissant, je reprenais :
— Maudits,
Ces monastères sourds ! bouges ! prisons haïes !
Oh ! comme on fit jadis au pédant de Veïes,
Culotte bas, vieux tigre ! Écoliers ! écoliers !
Accourez par essaims, par bandes, par milliers,
Du gamin de Paris au græculus de Rome,
Et coupez du bois vert, et fouaillez-moi cet homme !
Jeunes bouches, mordez le metteur de bâillons !
Le mannequin sur qui l’on drape des haillons
A tout autant d’esprit que ce cuistre en son antre.
Et tout autant de cœur ; et l’un a dans le ventre
Du latin et du grec comme l’autre a du foin.
Ah ! je prends Phyllodoce et Xanthis à témoin
Que je suis amoureux de leurs claires tuniques ;
Mais je hais l’affreux tas des vils pédants iniques !
Confier un enfant, je vous demande un peu,
À tous ces êtres noirs ! autant mettre, morbleu,
La mouche en pension chez une tarentule !
Ces moines, expliquer Platon, lire Catulle,
Tacite racontant le grand Agricola,
Lucrèce ! eux, déchiffrer Homère, ces gens-là !
Ces diacres, ces bedeaux dont le groin renifle !
Crânes d’où sort la nuit, pattes d’où sort la gifle,
Vieux dadais à l’air rogue, au sourcil triomphant,
Qui ne savent pas même épeler un enfant !
Ils ignorent comment l’âme naît et veut croître.
Cela vous a Laharpe et Nonotte pour cloître !
Ils en sont à l’A, B, C, D, du cœur humain ;
Ils sont l’horrible Hier qui veut tuer Demain ;
Ils offrent à l’aiglon leurs règles d’écrevisses.
Et puis ces noirs tessons ont une odeur de vices.
Ô vieux pots égueulés des soifs qu’on ne dit pas !
Le pluriel met une S à leurs meas culpas,
Les boucs mystérieux, en les voyant s’indignent,
Et, quand on dit : « Amour ! » terre et cieux ! ils se signent.
Leur vieux viscère mort insulte au cœur naissant.
Ils le prennent de haut avec l’adolescent,
Et ne tolèrent pas le jour entrant dans l’âme
Sous la forme pensée ou sous la forme femme.
Quand la muse apparaît, ces hurleurs de holà
Disent : « Qu’est-ce que c’est que cette folle-là ? »
Et, devant ses beautés, de ses rayons accrues,
Ils reprennent : « Couleurs dures, nuances crues ;
« Vapeurs, illusions, rêves ; et quel travers
« Avez-vous de fourrer l’arc-en-ciel dans vos vers ? »
Ils raillent les enfants, ils raillent les poëtes ;
Ils font aux rossignols leurs gros yeux de chouettes ;
L’enfant est l’ignorant, ils sont l’ignorantin ;
Ils raturent l’esprit, la splendeur, le matin ;
Ils sarclent l’idéal ainsi qu’un barbarisme,
Et ces culs de bouteille ont le dédain du prisme ! —
Ainsi l’on m’entendait dans ma geôle crier.
Le monologue avait le temps de varier.
Et je m’exaspérais, faisant la faute énorme,
Ayant raison au fond, d’avoir tort dans la forme.
Après l’abbé Tuet, je maudissais Bezout ;
Car, outre les pensums où l’esprit se dissout,
J’étais alors en proie à la mathématique.
Temps sombre ! enfant ému du frisson poétique,
Pauvre oiseau qui heurtais du crâne mes barreaux,
On me livrait tout vif aux chiffres, noirs bourreaux ;
On me faisait de force ingurgiter l’algèbre ;
On me liait au fond d’un Boisbertrand funèbre ;
On me tordait, depuis les ailes jusqu’au bec,
Sur l’affreux chevalet des X et des Y ;
Hélas ! on me fourrait sous les os maxillaires
Le théorème orné de tous ses corollaires ;
Et je me débattais, lugubre patient
Du diviseur prêtant main-forte au quotient.
De là mes cris.
Un jour, quand l’homme sera sage,
Lorsqu’on n’instruira plus les oiseaux par la cage,
Quand les sociétés difformes sentiront
Dans l’enfant mieux compris se redresser leur front,
Que, des libres essors ayant sondé les règles,
On connaîtra la loi de croissance des aigles,
Et que le plein midi rayonnera pour tous,
Savoir étant sublime, apprendre sera doux.
Alors, tout en laissant au sommet des études
Les grands livres latins et grecs, ces solitudes
Où l’éclair gronde, où luit la mer, où l’astre rit,
Et qu’emplissent les vents immenses de l’esprit,
C’est en les pénétrant d’explication tendre,
En les faisant aimer, qu’on les fera comprendre.
Homère emportera dans son vaste reflux
L’écolier ébloui ; l’enfant ne sera plus
Une bête de somme attelée à Virgile ;
Et l’on ne verra plus ce vif esprit agile
Devenir, sous le fouet d’un cuistre ou d’un abbé,
Le lourd cheval poussif du pensum embourbé.
Chaque village aura, dans un temple rustique,
Dans la lumière, au lieu du magister antique,
Trop noir pour que jamais le jour y pénétrât,
L’instituteur lucide et grave, magistrat
Du progrès, médecin de l’ignorance, et prêtre
De l’idée ; et dans l’ombre on verra disparaître
L’éternel écolier et l’éternel pédant.
L’aube vient en chantant, et non pas en grondant.
Nos fils riront de nous dans cette blanche sphère ;
Ils se demanderont ce que nous pouvions faire
Enseigner au moineau par le hibou hagard.
Alors, le jeune esprit et le jeune regard
Se lèveront avec une clarté sereine
Vers la science auguste, aimable et souveraine ;
Alors, plus de grimoire obscur, fade, étouffant ;
Le maître, doux apôtre incliné sur l’enfant,
Fera, lui versant Dieu, l’azur et l’harmonie,
Boire la petite âme à la coupe infinie,
Alors, tout sera vrai, lois, dogmes, droits, devoirs.
Tu laisseras passer dans tes jambages noirs
Une pure lueur, de jour en jour moins sombre,
Ô nature, alphabet des grandes lettres d’ombre !
Paris, mai 1831.
http://entendre-victor-hugo.com/wp-content/uploads/2015/05/apropos-dhorace-aurore-contemplations.jpg600800Pierre-François Kettlerhttp://entendre-victor-hugo.com/wp-content/uploads/2014/08/logo-site-essai-300x137.jpgPierre-François Kettler2015-05-02 17:41:062018-06-14 10:21:00XIII. À propos d'Horace
Les Contemplations – Livre deuxième : L’Âme en fleur ;
Collection Bouquins chez Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 320.
Que le sort, quel qu’il soit… – L’enregistrement
Je vous invite à écouter Que le sort, quel qu’il soit…, un poème du recueil Les Contemplations, L’Âme en fleur, de Victor Hugo.
Il est précédé de XXIII. Après l’hiver et suivi de XXV. Je respire où tu palpites….
Que le sort, quel qu’il soit…
Que le sort, quel qu’il soit… – Le texte
XXIV
Que le sort, quel qu’il soit, vous trouve toujours grande !
Que demain soit doux comme hier !
Qu’en vous, ô ma beauté, jamais ne se répande
Le découragement amer,
Ni le fiel, ni l’ennui des cœurs qui se dénouent,
Ni cette cendre, hélas ! que sur un front pâli,
Dans l’ombre, à petit bruit secouent
Les froides ailes de l’oubli !
Laissez, laissez brûler pour vous, ô vous que j’aime,
Mes chants dans mon âme allumés !
Vivez pour la nature, et le ciel, et moi-même !
Après avoir souffert, aimez !
Laissez entrer en vous, après nos deuils funèbres,
L’aube, fille des nuits, l’amour, fils des douleurs,
Tout ce qui luit dans les ténèbres,
Tout ce qui sourit dans les pleurs !
Octobre 18..
http://entendre-victor-hugo.com/wp-content/uploads/2015/03/que-le-sort-ame-contemplations.jpg600800Pierre-François Kettlerhttp://entendre-victor-hugo.com/wp-content/uploads/2014/08/logo-site-essai-300x137.jpgPierre-François Kettler2015-03-27 16:48:512018-06-14 10:21:21XXIV. Que le sort, quel qu'il soit...
Les Chansons des rues et des bois – Livre premier : Jeunesse – VI. L’Éternel Petit Roman ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 957.
Les trop heureux – L’enregistrement
Je vous invite à écouter Les trop heureux, un poème du recueil Les Chansons des rues et des bois, du Livre premier : Jeunesse, VI. L’Éternel Petit Roman, de Victor Hugo.
Les trop heureux
Les trop heureux – Le texte
XVI
Les trop heureux
Quand avec celle qu’on enlève,
Joyeux, on s’est enfui si loin,
Si haut, qu’au-dessus de son rêve
On n’a plus que Dieu, doux témoin ;
Quand, sous un dais de fleurs sans nombre,
On a fait tomber sa beauté
Dans quelque précipice d’ombre,
De silence et de volupté ;
Quand, au fond du hallier farouche,
Dans une nuit pleine de jour,
Une bouche sur une bouche
Baise ce mot divin : amour !
Quand l’homme contemple la femme,
Quand l’amante adore l’amant,
Quand, vaincus, ils n’ont plus dans l’âme
Qu’un muet éblouissement,
Ce profond bonheur solitaire,
C’est le ciel que nous essayons.
Il irrite presque la terre
Résistante à trop de rayons.
Ce bonheur rend les fleurs jalouses
Et les grands chênes envieux,
Et fait qu’au milieu des pelouses
Le lys trouve le rosier vieux ;
Ce bonheur est si beau qu’il semble
Trop grand, même aux êtres ailés ;
Et la libellule qui tremble,
La graine aux pistils étoilés,
Et l’étamine, âme inconnue,
Qui de la plante monte au ciel,
Le vent errant de nue en nue,
L’abeille errant de miel en miel,
L’oiseau, que les hivers désolent,
Le frais papillon rajeuni,
Toutes les choses qui s’envolent,
En murmurent dans l’infini.
http://entendre-victor-hugo.com/wp-content/uploads/2014/12/lestrop-heureux-chansons.jpg600800Pierre-François Kettlerhttp://entendre-victor-hugo.com/wp-content/uploads/2014/08/logo-site-essai-300x137.jpgPierre-François Kettler2014-12-06 18:34:472018-06-14 10:24:04XVI. Les trop heureux
Les Chansons des rues et des bois – Livre premier : Jeunesse – III. Pour Jeanne seule ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 884.
Jeanne chante ; elle se penche… – L’enregistrement
Je vous invite à écouter Jeanne chante ; elle se penche…, un poème du recueil Les Chansons des rues et des bois, du Livre premier : Jeunesse, III. Pour Jeanne seule, de Victor Hugo.
Jeanne chante ; elle se penche…
Jeanne chante ; elle se penche… – Le texte
II
Jeanne chante ; elle se penche
Et s’envole ; elle me plaît ;
Et, comme de branche en branche,
Va de couplet en couplet.
De quoi donc me parlait-elle ?
Avec sa fleur au corset,
Et l’aube dans sa prunelle,
Qu’est-ce donc qu’elle disait ?
Parlait-elle de la gloire,
Des camps, du ciel, du drapeau,
Ou de ce qu’il faut de moire
Au bavolet d’un chapeau ?
Son intention fut-elle
De troubler l’esprit voilé
Que Dieu dans ma chair mortelle
Et frémissante a mêlé ?
Je ne sais. J’écoute encore.
Était-ce psaume ou chanson ?
Les fauvettes de l’aurore
Donnent le même frisson.
J’étais comme en une fête ;
J’essayais un vague essor ;
J’eusse voulu sur ma tête
Mettre une couronne d’or,
Et voir sa beauté sans voiles,
Et joindre à mes jours ses jours,
Et prendre au ciel les étoiles,
Et qu’on vînt à mon secours !
J’étais ivre d’une femme ;
Mal charmant qui fait mourir.
Hélas ! je me sentais l’âme
Touchée et prête à s’ouvrir ;
Car, pour qu’un cerveau se fêle
Et s’échappe en songes vains,
Il suffit du bout de l’aile
D’un de ces oiseaux divins.
http://entendre-victor-hugo.com/wp-content/uploads/2014/10/jeannechante-chansons.jpg600800Pierre-François Kettlerhttp://entendre-victor-hugo.com/wp-content/uploads/2014/08/logo-site-essai-300x137.jpgPierre-François Kettler2014-10-29 11:09:172018-06-14 10:25:07II. Jeanne chante ; elle se penche...