Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente un château (de l'Arbrelles ?) perché sur une colline qui surplombe un village près duquel sinue une rivière.

XXII. Le château de l’Arbrelles

Le château de l’Arbrelles – Les références

Toute la lyreSeptième partie : [La Fantaisie] ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie IV, p 502.

Le château de l’Arbrelles – L’enregistrement

Je vous invite à écouter Le château de l’Arbrelles, un poème de la Septième partie : [La Fantaisie], du recueil Toute la lyre, de Victor Hugo.

Le château de l’Arbrelles


Le château de l’Arbrelles – Le texte

XXII
Le château de l’Arbrelles
Danse en rond

I

Va cueillir, villageoise,
La fraise et la framboise
Dans les champs, aux beaux jours.
À huit milles d’Amboise,
À deux milles de Tours,
Le château de l’Arbrelles,
Roi de ces alentours,
Se dresse avec ses tours,
Ses tours et ses tourelles.
Va cueillir aux beaux jours
La fraise et la framboise,
À huit milles d’Amboise,
À deux milles de Tours,
C’est là que sont les tours,
Les tours et les tourelles
Du château de l’Arbrelles
Bien connu des vautours.

II

Cueillez, Jeanne et Thérèse,
La framboise et la fraise,
Rions, dansons, aimons,
Le ciel en est bien aise,
Moquons-nous des sermons.
Le château de l’Arbrelles,
Qu’en chantant nous nommons,
Dresse sur les vieux monts
Ses tours et ses tourelles.
Rions, dansons, aimons,
Cueillez, Jeanne et Thérèse,
La framboise et la fraise,
Moquons-nous des sermons.
Là-bas, sur les vieux monts
Se dressent les tourelles
Du château de l’Arbrelles
Bien connu des démons.

III

Cueillez, filles d’Amboise,
La fraise et la framboise.
Les démons, les vautours,
Ont changé de figure
Depuis les anciens jours.
Tours de sinistre augure,
L’herbe croît dans vos cours,
Croulez, vilaines tours !
Le ciel en est bien aise.
Aimons, les ans sont courts,
Cueillez, Jeanne et Thérèse,
La framboise et la fraise.
Ô belles, nos amours,
Pour piller vos atours,
Pour vous emplir de flammes,
Les démons sont nos âmes,
Nos cœurs sont les vautours.

7 octobre 1876.

VIII. Chanson

Chanson – Les références

Toute la lyreSeptième partie : [La Fantaisie] ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie IV, p 449.

Chanson – L’enregistrement

Je vous invite à écouter cette Chanson, ce poème du recueil Toute la lyre, de la Septième partie : [La Fantaisie], de Victor Hugo.

Chanson


Chanson – Le texte

VIII
Chanson

L’hiver gronde et fait cent querelles,
Ô vieilles gens, ô vieilles gens,
Aux girouettes des tourelles ;
Pendant qu’elles grincent entre elles,
Courez aux tripots indulgents,
Ô jeunes gens, ô jeunes gens.

L’araignée au mur fait sa trame,
Ô vieilles gens, ô vieilles gens.
L’archet frémit, le gaz s’enflamme,
L’aile du beau papillon femme
Étale ses reflets changeants,
Ô jeunes gens, ô jeunes gens.

Cachez de l’or dans vos paillasses,
Ô vieilles gens, ô vieilles gens.
Buvez du punch, prenez des glaces,
Les rires narguent les grimaces,
Les masques raillent les sergents,
Ô jeunes gens, ô jeunes gens.

La mort tient tout dans ses doigts grêles,
Ô vieilles gens, ô vieilles gens.
Vous serez dupés par les belles,
Et vous fuirez hors de chez elles,
Nus comme de petits Saint-Jeans,
Ô jeunes gens, ô jeunes gens.

La mort vide vos escarcelles,
Ô vieilles gens, ô vieilles gens.
Les tourtereaux aux molles ailes
Sont plumés par les tourterelles ;
Bouches roses et becs rongeants ;
Ô jeunes gens, ô jeunes gens.

Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente un homme barbu et chauve, au visage épanoui et facétieux.

IX. Oui, fût-on Homère, il faut rire…

Oui, fût-on Homère, il faut rire… – Les références

Toute la lyreSeptième partie : [La Fantaisie] ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie IV, p 450.

Oui, fût-on Homère, il faut rire… – L’enregistrement

Je vous invite à écouter Oui, fût-on Homère, il faut rire…, un poème du recueil Toute la lyre, de la Septième partie : [La Fantaisie], de Victor Hugo.

Oui, fût-on Homère, il faut rire…


Oui, fût-on Homère, il faut rire… – Le texte

IX


Oui, fût-on Homère, il faut rire ;
Il faut rire, fût-on Caton.
Le bois nous offre Déjanire,
Le pré nous donne Margoton.

Le rire vient des dieux. À Rome
Comme à Pantin, il règne, il est.
Le rire est l’attribut de l’homme,
César riait, Brutus riait.

Jésus souriait. Mais en somme,
Sourire, c’est bien rire un peu.
Et c’est pour cela qu’il est homme,
Et c’est pour cela qu’il est Dieu.

Le bois nous offre Déjanire,
Le pré nous donne Margoton.
Oui, fût-on Homère, il faut rire,
Il faut rire, mon cher Caton.

Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente deux tours perchées et jointes par un pont au-dessus du gouffre.

XI – Quiconque est amoureux est esclave et s’abdique…

Quiconque est amoureux… – Les références

Toute la lyreSeptième partie : [La fantaisie] ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie IV, p 451.

Quiconque est amoureux… – L’enregistrement

Je vous invite à écouter Quiconque est amoureux…, un poème du recueil Toute la lyre, de la Septième partie : [La fantaisie], de Victor Hugo.

Quiconque est amoureux…


Quiconque est amoureux est esclave et s’abdique – Le texte

XI

………………………………………………….
Quiconque est amoureux est esclave et s’abdique.
L’amour n’est pas l’amour ; il s’appelle Ananké.
Si l’on ne veut pas être à la porte flanqué,
Dès qu’on aime une belle, on s’observe, on se scrute ;
On met le naturel de côté ; bête brute,
On se fait ange ; on est le nain Micromégas ;
Surtout on ne fait pas chez elle de dégâts ;
On se tait, on attend, jamais on ne s’ennuie,
On trouve bon le givre, et la bise et la pluie,
On n’a ni faim, ni soif, on est de droit transi ;
Un coup de dent de trop vous perd. Oyez ceci :

Un brave ogre des bois, natif de Moscovie,
Était fort amoureux d’une fée, et l’envie
Qu’il avait d’épouser cette dame s’accrut
Au point de rendre fou ce pauvre cœur tout brut ;
L’ogre un beau jour d’hiver peigne sa peau velue,
Se présente au palais de la fée, et salue,
Et s’annonce à l’huissier comme prince Ogrousky.
La fée avait un fils, on ne sait pas de qui.
Elle était ce jour-là sortie, et quant au mioche,
Bel enfant blond nourri de crème et de brioche,
Don fait par quelque Ulysse à cette Calypso,
Il était sous la porte et jouait au cerceau.
On laissa l’ogre et lui tout seuls dans l’antichambre.
Comment passer le temps quand il neige en décembre,
Et quand on n’a personne avec qui dire un mot ?
L’ogre se mit alors à croquer le marmot.
C’est très simple. Pourtant c’est aller un peu vite,
Même lorsqu’on est ogre et qu’on est moscovite,
Que de gober ainsi les mioches du prochain.
Le bâillement d’un ogre est frère de la faim.
Quand la dame rentra, plus d’enfant. On s’informe.
La fée avise l’ogre avec sa bouche énorme.
As-tu vu, cria-t-elle, un bel enfant que j’ai ?
Le bon ogre naïf lui dit : Je l’ai mangé.

Or, c’était maladroit. Vous qui cherchez à plaire,
Jugez ce que devint l’ogre devant la mère
Furieuse qu’il eût soupé de son dauphin.
Que l’exemple vous serve ; aimez, mais soyez fin ;
Adorez votre belle, et soyez plein d’astuce ;
N’allez pas lui manger, comme cet ogre russe,
Son enfant, ou marcher sur la patte à son chien.