XI. Le couchant flamboyait à travers les bruines…
Le couchant flamboyait à travers les bruines…
– Les références
Toute la lyre – Cinquième partie : [Le « Moi »] ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie IV, p 349.
Le couchant flamboyait à travers les bruines…
– L’enregistrement
Je vous invite à écouter Le couchant flamboyait à travers les bruines…
, un poème de la cinquième partie : [Le « Moi »], du recueil Toute la lyre, de Victor Hugo.
Le couchant flamboyait à travers les bruines…
Le couchant flamboyait à travers les bruines…
– Le texte
XI
Le couchant flamboyait à travers les bruines
Comme le fronton d’or d’un vieux temple en ruines.
L’arbre avait un frisson.
La mer au loin semblait, en ondes recourbée,
Une colonne torse en marbre vert, tombée
Sur l’énorme horizon.
La vague, roue errante, et l’écume, cavale,
S’enfuyaient ; je voyais luire par intervalle
Les cieux pleins de regards ;
Les flots allaient, venaient, couraient, sans fin, sans nombre,
Et j’écoutais, penché sur ce cirque de l’ombre,
Le bruit de tous ces chars.
Lugubre immensité ! profondeurs redoutées !
Tous sont là, les Satans comme les Prométhées.
Ténébreux océans !
Cieux, vous êtes l’abîme où tombent les génies.
Oh! combien l’œil, au fond des brumes infinies,
Aperçoit de géants !
Ô vie, énigme, sphinx, nuit, sois la bienvenue !
Car je me sens d’accord avec l’Âme inconnue.
Je souffre, mais je crois.
J’habite l’absolu, patrie obscure et sombre,
Pas plus intimidé dans tous ces gouffres d’ombre
Que l’oiseau dans les bois.
Je songe, l’œil fixé sur l’incompréhensible.
Le zénith est fermé. Les justes sont la cible
Du mensonge effronté ;
Le bien, qui semble aveugle, a le mal pour ministre,
Mais, rassuré, je vois sous la porte sinistre
La fente de clarté.
11 avril 1870.