Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente la tête tournée vers le bas d'une "femme habile à se taire".

VI. C’est parce qu’elle se taisait

C’est parce qu’elle se taisait – Les références

Les Chansons des rues et des boisLivre premier : JeunesseVI. L’Éternel Petit Roman ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 944.

C’est parce qu’elle se taisait – L’enregistrement

Je vous invite à écouter C’est parce qu’elle se taisait, un poème du recueil Les Chansons des rues et des bois, du Livre premier : Jeunesse, VI. L’Éternel Petit Roman, de Victor Hugo.
Il est précédé du poème V. À Rosita et suivi de VII. À la belle impérieuse.

C’est parce qu’elle se taisait


C’est parce qu’elle se taisait – Le texte

VI
C’est parce qu’elle se taisait


Son silence fut mon vainqueur ;
C’est ce qui m’a fait épris d’elle.
D’abord je n’avais dans le cœur
Rien qu’un obscur battement d’aile.

Nous allions en voiture au bois,
Seuls tous les soirs, et loin du monde ;
Je lui parlais, et d’autres voix
Chantaient dans la forêt profonde.

Son œil était mystérieux.
Il contient, cet œil de colombe,
Le même infini que les cieux,
La même aurore que la tombe.

Elle ne disait rien du tout,
Pensive au fond de la calèche.
Un jour je sentis tout à coup
Trembler dans mon âme une flèche.

L’Amour, c’est le je ne sais quoi.
Une femme habile à se taire
Est la caverne où se tient coi
Ce méchant petit sagittaire.

Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente la tête tournée d'une femme à laquelle le poète s'adresse : Tu ne veux pas aimer, méchante ?".

V. À Rosita

À Rosita – Les références

Les Chansons des rues et des boisLivre premier : JeunesseVI. L’Éternel Petit Roman ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 944.

À Rosita – L’enregistrement

Je vous invite à écouter À Rosita, un poème du Livre premier : Jeunesse, VI. L’Éternel Petit Roman, du recueil Les Chansons des rues et des bois, de Victor Hugo.

À Rosita


À Rosita – Le texte

V
À Rosita


Tu ne veux pas aimer, méchante ?
Le printemps en est triste, vois ;
Entends-tu ce que l’oiseau chante
Dans la sombre douceur des bois ?

Sans l’amour rien ne reste d’Ève ;
L’amour, c’est la seule beauté ;
Le ciel, bleu quand l’astre s’y lève,
Est tout noir, le soleil ôté.

Tu deviendras laide toi-même
Si tu n’as pas plus de raison.
L’oiseau chante qu’il faut qu’on aime,
Et ne sait pas d’autre chanson.

Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente le dos nu d'une femme allongée.

XIV. Rosa fâchée

Rosa fâchée – Les références

Les Chansons des rues et des boisLivre premier : JeunesseVI. L’Éternel Petit Roman ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 956.

Rosa fâchée – L’enregistrement

Je vous invite à écouter Rosa fâchée, un poème du recueil Les Chansons des rues et des bois, du Livre premier : Jeunesse, VI. L’Éternel Petit Roman, de Victor Hugo.

Rosa fâchée


Rosa fâchée – Le texte

XIV
Rosa fâchée


Une querelle. Pourquoi ?
Mon Dieu ! parce qu’on s’adore.
À peine s’est-on dit Toi
Que Vous se hâte d’éclore.

Le cœur tire sur son nœud ;
L’azur fuit ; l’âme est diverse.
L’amour est un ciel, qui pleut
Sur les amoureux à verse.

De même, quand, sans effroi,
Dans la forêt que juin dore,
On va rôder sur la foi
Des promesses de l’aurore,

On peut être pris le soir,
Car le beau temps souvent triche,
Par un gros nuage noir
Qui n’était pas sur l’affiche.

Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente des formes sombres et effilées dans un ciel de lumière où évoluent les trop heureux.

XVI. Les trop heureux

Les trop heureux – Les références

Les Chansons des rues et des boisLivre premier : JeunesseVI. L’Éternel Petit Roman ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 957.

Les trop heureux – L’enregistrement

Je vous invite à écouter Les trop heureux, un poème du recueil Les Chansons des rues et des bois, du Livre premier : Jeunesse, VI. L’Éternel Petit Roman, de Victor Hugo.

Les trop heureux


Les trop heureux – Le texte

XVI
Les trop heureux

Quand avec celle qu’on enlève,
Joyeux, on s’est enfui si loin,
Si haut, qu’au-dessus de son rêve
On n’a plus que Dieu, doux témoin ;

Quand, sous un dais de fleurs sans nombre,
On a fait tomber sa beauté
Dans quelque précipice d’ombre,
De silence et de volupté ;

Quand, au fond du hallier farouche,
Dans une nuit pleine de jour,
Une bouche sur une bouche
Baise ce mot divin : amour !

Quand l’homme contemple la femme,
Quand l’amante adore l’amant,
Quand, vaincus, ils n’ont plus dans l’âme
Qu’un muet éblouissement,

Ce profond bonheur solitaire,
C’est le ciel que nous essayons.
Il irrite presque la terre
Résistante à trop de rayons.

Ce bonheur rend les fleurs jalouses
Et les grands chênes envieux,
Et fait qu’au milieu des pelouses
Le lys trouve le rosier vieux ;

Ce bonheur est si beau qu’il semble
Trop grand, même aux êtres ailés ;
Et la libellule qui tremble,
La graine aux pistils étoilés,

Et l’étamine, âme inconnue,
Qui de la plante monte au ciel,
Le vent errant de nue en nue,
L’abeille errant de miel en miel,

L’oiseau, que les hivers désolent,
Le frais papillon rajeuni,
Toutes les choses qui s’envolent,
En murmurent dans l’infini.

Femme couchée de dos dont on aperçoit la tête aux cheveux blonds en chignon, posée sur un oreiller enroulé, une mantille entoure ses épaule et révèle son dos, nu, qui sort à mi-tronc d'une couverture bariolée.

IV. À Doña Rosita Rosa

À Doña Rosita Rosa – Les références

Les Chansons des rues et des boisLivre premier : JeunesseVI. L’Éternel Petit Roman ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 943.

À Doña Rosita Rosa – L’enregistrement

Je vous invite à écouter À Doña Rosita Rosa, un poème du recueil Les Chansons des rues et des bois, du Livre premier : Jeunesse, VI. L’Éternel Petit Roman, de Victor Hugo.

À Doña Rosita Rosa


À Doña Rosita Rosa – Le texte

IV
À Doña Rosita Rosa

I

Ce petit bonhomme bleu
Qu’un souffle apporte et remporte,
Qui, dès que tu dors un peu,
Gratte de l’ongle à ta porte,

C’est mon rêve. Plein d’effroi,
Jusqu’à ton seuil il se glisse.
Il voudrait entrer chez toi
En qualité de caprice.

Si tu désires avoir
Un caprice aimable, leste,
Et prenant un air céleste
Sous les étoiles du soir,

Mon rêve, ô belle des belles,
Te convient ; arrangeons-nous.
Il a ton nom sur ses ailes
Et mon nom sur ses genoux.

Il est doux, gai, point morose,
Tendre, frais, d’azur baigné.
Quant à son ongle, il est rose,
Et j’en suis égratigné.

II

Prends-le donc à ton service.
C’est un pauvre rêve fou ;
Mais pauvreté n’est pas vice.
Nul cœur ne ferme au verrou ;

Ton cœur, pas plus que mon âme
N’est clos et barricadé.
Ouvrez donc, ouvrez, madame,
À mon doux songe évadé.

Les heures pour moi sont lentes,
Car je souffre éperdument ;
Il vient sur ton front charmant
Poser ses ailes tremblantes.

T’obéir sera son vœu ;
Il dorlotera ton âme ;
Il fera chez toi du feu,
Et, s’il le peut, de la flamme.

Il fera ce qui te plaît ;
Prompt à voir tes désirs naître ;
Belle, il sera ton valet,
Jusqu’à ce qu’il soit ton maître.

Ce détail d'un dessin de Victor Hugo représente un être couvert d'une cagoule et d'une grande robe avec un œil pectoral ; deux êtres aux cheveux dressés l'entourent derrière un arbres qu'ils tiennent en leurs bras sans mains. Au fond, le disque solaire apparaît.

I. Le doigt de la femme

Le doigt de la femme – Les références

Les Chansons des rues et des boisLivre premier : JeunesseVI. L’Éternel Petit Roman ;
Collection Bouquins, Robert Laffont, Œuvres complètes de Victor Hugo, Poésie II, p 935.

Le doigt de la femme – L’enregistrement

Je vous invite à écouter Le doigt de la femme, un poème du recueil Les Chansons des rues et des bois, du Livre premier : Jeunesse, VI. L’Éternel Petit Roman, de Victor Hugo.

Le doigt de la femme


Le doigt de la femme – Le texte

I
Le doigt de la femme

Dieu prit sa plus molle argile
Et son plus pur kaolin,
Et fit un bijou fragile,
Mystérieux et câlin.

Il fit le doigt de la femme,
Chef-d’œuvre auguste et charmant,
Ce doigt fait pour toucher l’âme
Et montrer le firmament.

Il mit dans ce doigt le reste
De la lueur qu’il venait
D’employer au front céleste
De l’heure où l’aurore naît.

Il y mit l’ombre du voile,
Le tremblement du berceau,
Quelque chose de l’étoile,
Quelque chose de l’oiseau.

Le Père qui nous engendre
Fit ce doigt mêlé d’azur,
Très fort pour qu’il restât tendre,
Très blanc pour qu’il restât pur,

Et très doux, afin qu’en somme
Jamais le mal n’en sortît,
Et qu’il pût sembler à l’homme
Le doigt de Dieu, plus petit.

Il en orna la main d’Ève,
Cette frêle et chaste main
Qui se pose comme un rêve
Sur le front du genre humain.

Cette humble main ignorante,
Guide de l’homme incertain,
Qu’on voit trembler, transparente,
Sur la lampe du destin.

Oh ! dans ton apothéose,
Femme, ange aux regards baissés,
La beauté, c’est peu de chose,
La grâce n’est pas assez ;

Il faut aimer. Tout soupire,
L’onde, la fleur, l’alcyon ;
La grâce n’est qu’un sourire,
La beauté n’est qu’un rayon ;

Dieu, qui veut qu’Ève se dresse
Sur notre rude chemin,
Fit pour l’amour la caresse,
Pour la caresse ta main.

Dieu, lorsque ce doigt qu’on aime
Sur l’argile fut conquis,
S’applaudit, car le suprême
Est fier de créer l’exquis.

Ayant fait ce doigt sublime,
Dieu dit aux anges : Voilà !
Puis s’endormit dans l’abîme ;
Le diable alors s’éveilla.

Dans l’ombre où Dieu se repose,
Il vint, noir sur l’orient,
Et tout au bout du doigt rose
Mit un ongle en souriant.